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Pourvoi en cassation dans le cadre d’une succession de demandes de suspension : le Conseil rend un arrêt en section

Public - Droit public général
27/09/2023
Dans un arrêt rendu par la section du contentieux le 22 septembre 2023, le Conseil d’État a déclaré que dans le cas d’une succession de demandes de suspension au juge des référés ayant le même objet, lorsque le requérant se pourvoit en cassation contre l’une des ordonnances rendues et présente une nouvelle demande en référé, demande rejetée postérieurement à l’introduction du pourvoi, cette dernière ordonnance du juge des référés rend sans objet le pourvoi.
Dans cette affaire, le Conseil d’État a eu à se pencher sur le cas d’un requérant ayant déposé une succession de demandes de suspension auprès du juge des référés, et ayant formé un pourvoi en cassation contre l’une des ordonnances rendues, avant de saisir à nouveau le juge des référés.
 
Un maire avait pris une décision de non-opposition à une déclaration préalable en vue de travaux portant sur la réhabilitation d’une ferme, puis avait adopté un arrêté interruptif de travaux.
 
Le requérant avait demandé à trois reprises au juge des référés du tribunal administratif (TA) de Grenoble la suspension de l’exécution de cet arrêté interruptif de travaux. Le TA avait rejeté la demande faute d’urgence par trois ordonnances rendues les 14 octobre 2022, 10 janvier et 1er mars 2023.
 
Le requérant a ensuite saisi le Conseil d’État d’une demande d’annulation de l’ordonnance du 1er mars 2023.
 
Par ailleurs, postérieurement à l’ordonnance du 1er mars 2023, et alors qu’il avait déposé un pourvoi, le requérant a à nouveau saisi le TA d’une demande de suspension du même arrêté, demande rejetée par ordonnance du 28 avril 2023.
 
Le Conseil d’État a jugé que cette affaire justifiait un examen par la section du contentieux car elle posait la question suivante :

« Lorsqu’un juge des référés de tribunal administratif a été saisi par un même requérant de demandes réitérées de suspension d’une même décision administrative, sur le fondement de l’article L. 521-1 du CJA, et qu’il les a à chaque fois rejetées pour défaut d’urgence, l’intervention d’une nouvelle décision de rejet prive-t-elle d’objet le pourvoi en cassation dirigé contre une précédente ordonnance de rejet ? ».

Par un arrêt de section du 22 septembre 2023 (CE, sect., 22 sept. 2023, n° 472210) le Conseil a répondu qu’en effet, le pourvoi en cassation est privé d’objet par l’intervention d’une nouvelle décision de rejet contre la nouvelle demande du requérant auprès du juge des référés du tribunal administratif.
 
Il rappelle dans un premier temps que les ordonnances du juge des référés sont dépourvues de l’autorité de chose jugée, et que par conséquent, un requérant peut bien saisir le juge de demandes successives ayant le même objet :  « Si les ordonnances par lesquelles le juge des référés fait usage de ses pouvoirs de juge de l'urgence sont exécutoires et, en vertu de l'autorité qui s'attache aux décisions de justice, obligatoires, elles sont, compte tenu de leur caractère provisoire, dépourvues de l'autorité de chose jugée. Il en résulte que la circonstance que le juge des référés a rejeté une première demande de suspension présentée sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative ne fait pas obstacle à ce que le même requérant saisisse ce juge d'une nouvelle demande ayant le même objet, notamment en soulevant des moyens ou en faisant valoir des éléments nouveaux, alors même qu'ils auraient pu lui être soumis dès sa première saisine. »

La Haute cour annonce toutefois que le fait qu’une ordonnance de rejet ait été rendue postérieurement au dépôt du pourvoi en cassation contre une ordonnance rendue sur une demande ayant le même objet rend sans objet les conclusions dirigées contre la première ordonnance : « Dans le cas où le demandeur, après le rejet d'une demande de suspension présentée sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, fait usage de cette faculté en saisissant à nouveau le juge des référés de conclusions ayant le même objet et se pourvoit également en cassation contre la première ordonnance ayant rejeté sa demande, l'intervention, postérieurement à l'introduction de ce pourvoi, d'une nouvelle ordonnance rejetant la nouvelle demande rend, eu égard à la nature de la procédure de référé, sans objet les conclusions dirigées contre la première ordonnance, alors même que la seconde n'est pas devenue définitive. » Le conseil rend donc une décision de non-lieu à statuer.
 
Source : Actualités du droit