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Pas d’obligation pour l’agent public d’informer son recruteur de l’enquête pénale le mettant en cause

Public - Droit public général
Pénal - Procédure pénale
08/02/2023
Dans un arrêt rendu le 3 février 2023, le Conseil d’État rappelle que le devoir de probité auquel est tenu un agent public ne l’oblige pas, lorsqu’il demande une mutation, à informer la collectivité de recrutement qu’il fait l’objet d’une enquête pénale pour abus de confiance.
Dans une décision du 3 février 2023 (CE, 3 févr. 2023, n° 441867), le Conseil d’État rappelle qu’un agent public souhaitant une mutation n’a pas l’obligation d’informer son futur recruteur qu’il fait l’objet d’une enquête pénale, et que cette absence d’information ne peut être qualifiée de manquement au devoir de probité. Ainsi, le préjudice lié au retrait de la décision de recrutement du nouvel employeur et au refus de réintégration de l’ancien employeur liés à la connaissance de cette enquête ne découle pas « directement et exclusivement des fautes commises » par l’agent.
 
Une agente publique occupant les fonctions de gestionnaires des finances municipales dans une commune (Verneuil-sur-Seine) s’était portée candidate au poste de responsable des finances d’une autre commune (Linas). Après accord de la commune de Linas pour le recrutement, la commune de Verneuil-sur-Seine a donné son accord pour la mutation.
 
Condamnation de l’agente après acceptation de la mutation
 
Entre l’acceptation de la commune de Linas et la date de mutation, l’agente a fait l’objet d’une citation à comparaitre par le procureur de la République et a été condamnée par le tribunal à une peine de prison avec sursis pour un abus de confiance commis auprès du comité des affaires sociales d’une troisième commune, sans inscription au bulletin n° 2 du casier judiciaire.
 
Ayant eu connaissance de cette condamnation, la commune de Linas, où l’agente allait démarrer ses nouvelles fonctions, a indiqué à la commune d’origine de l’agente qu’elle ne souhaitait plus la recruter. La commune d’origine a alors refusé de reprendre l’agente.  L’agente a ensuite demandé une prise en charge pour maladie, ce que les deux communes ont refusé.
 
L’agente a demandé au tribunal administratif de Versailles la condamnation de la commune d’origine à réparer les préjudices subis du fait du refus de réintégration. Le tribunal a condamné la commune à indemniser l’agente à hauteur de 50 % des préjudices correspondant à la perte de traitement due au refus de la commune de l’affecter sur un emploi et des fonctions relevant de son grade.  La commune de Linas a également été condamnée à garantir la première à hauteur de 50 % des condamnation prononcées. La cour administrative de Versailles a ensuite annulé le jugement. L’agente se pourvoir en cassation contre son arrêt.
 
Absence de manquement au devoir de probité
 
Le Conseil d’État fait droit à la demande d’annulation de la requérante. Il rappelle qu’aucune disposition n’oblige un fonctionnaire à informer la collectivité auprès de laquelle il postule dans le cadre d’une mutation de l’existence d’une enquête pénale le mettant en cause, et que l’agent ne peut donc être « regardé comme ayant commis une fraude » en ne faisait pas état de cette enquête.
 
La cour administrative d’appel avait estimé que la requérante avait manqué au devoir de probité auquel elle était tenue en dissimulant l’enquête à la commune auprès de laquelle elle postulait. Or, elle n’était pas tenue de l’en informer. La cour avait considéré que du fait de ce manquement, le préjudice lié au refus réintégration de la première commune découlait « directement et exclusivement des fautes commises par la requérante ».  Le conseil considère qu’en raisonnant ainsi et en refusant de condamner la commune d’origine à réparer le préjudice sur ce fondement, la cour a commis une erreur de droit.
 
L’obligation de probité est expressément mentionnée dans le Code général de la fonction publique, qui prévoit : « l'agent public exerce ses fonctions avec dignité, impartialité, intégrité et probité. » (CGFP, art. L. 121-1).
Source : Actualités du droit